Palimpsestes




Manuscrits sur parchemin d'auteurs anciens que les copistes du Moyen Âge désencraient ou effaçaient à l'aide d'une pierre ponce pour écrire d'autres textes - le parchemin étant rare et cher.

Mécanisme psychologique - les faits nouvellement mémorisés se substituent à ceux qui leur préexistaient dans la mémoire. L’oubli n’est autre chose qu’un palimpseste en puissance - Il suffit qu'un événement singulier survienne, et tous les souvenirs effacés se recomposent pour revivre une autre histoire dans les interlignes de la mémoire étonnée

"Toute oeuvre est un palimpseste et si l’oeuvre est réussie, le texte effacé est toujours un 
texte magique (Un Beau ténébreux - Julien Gracq)

PALIMPSESTES

Pour moi le palimpseste c'est un miroir toujours renouvelé - un miroir comme un cours d'eau. Et il faut toujours que j'habite l´autre côte du fleuve que je viens de traverser.
Pour moi le palimpseste joue comme une frontière miroitante où mon reflet est l´autre, l´écho une parole à venir et le dessin transparent de noir - car "le lieu de l´être est toujours l´autre rive, et le lieu de l´image jamais le nom de son être" (Le Livre d'o - Cèzp)

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Mon travail, c'est rechercher la présence de la vérité  - le va-et-vient entre un extérieur et un intérieur.
Toujours j'essaye de construire les choses, mais aussi de les déconstruire. 

Je traverse mes dessins, je les fais vivre comme un roman en dessinant des pages toujours ouvertes sur les suivantes. Je me vois comme un papier calque - la limite de mon intérieur et de mon extérieur, une frontière osmotique entre moi et moi, entre moi et le monde. Les sensations et leurs sentiments peuvent traverser ce papier comme la lumière dont le reflet est le dessin-même.

Avec mes dessins, je n'arrête pas de faire des aller-retour dans ma mémoire, je n'arrête pas de superposer mes souvenirs imagés... et je continue ma vie et mon travail en superposant des images qui les racontent mon histoire. 

Je fais des séries de dessins. Je travaille sur papier calque parce que  je suis comme mes dessins qui sont autant de couches sédimentaires où la lumière peut traverser, qui sont des frontières perméables entre l'intérieur et l'extérieur - j'y reste, j'y respire ou bien je pars.
Je dessine mes souvenirs sur des supports translucides et dans des contours flottants, et j'accepte les  nouvelles choses qui viennent de l'extérieur et qui passent et repassent ces limites. Je dessine sur plusieurs plans et je les superpose; les séries de dessins me racontent et racontent le monde, soit dans la multiplicité déployée de ces images, soit dans l'image unique et singulière des dessins superposés et superposables à l'infini. 

Je dessine l'instant présent, mais je vois toujours les traces de mes souvenirs vivants... Je traverse chaque image - images qui n'ont jamais été effacées de mon coeur... je superpose dans l'espace le temps de mes cheminements passés et à venir.
Les relations palimpsestiques qu'entretiennent mes dessins entre eux et avec le monde, montrent mon histoire toujours renouvelée parce que renouvelable.